Le canton de Fribourg est une région riche en histoire et en traditions.
Certaines sont encore en vogue aujourd’hui, notamment dans le district de la
Gruyère, situé au sud du canton. Chaque année, lors de fêtes ou rassemblements,
on peut voir déambuler dans les rues de Bulle et des villages avoisinants des
femmes revêtues d’une robe et d’un tablier traditionnel appelé
« dzaquillon », tandis que les hommes portent un gilet et un pantalon
assortis, le fameux « bredzon ».
D’où viennent donc ces costumes ? Contrairement aux dires populaires,
ce ne sont pas des vêtements portés depuis toujours au sein du peuple gruérien.
Tout a commencé au XXe siècle, plus précisément en 1928, date de la création de
l’Association gruérienne pour les costumes et les coutumes (AGCC). A cette
époque, le conservateur du Musée gruérien Henri Naef « part en croisade
pour défendre – ou réinventer les traditions gruériennes ». En effet,
durant l’entre-deux guerres, l’on s’aperçoit que « les paysans cessent de
porter le vêtement de leur région de manière spontanée ». L’habit devient
alors costume, symbole d’identité régionale que l’on exhibe lors de
représentations. Henri Naef porte lui-même le bredzon et milite pour que les
hommes se vêtent du complet d’armailli (vacher qui fabrique le gruyère à
l’alpage) le dimanche. En revanche, « il est interdit aux dames et aux
messieurs de revêtir le costume dans les mascarades et en toute circonstance
incompatible avec la dignité qu’il mérite. » En bref, le port du bredzon
est considéré comme un honneur.
L’on cherche alors un costume pour femme qui irait avec cette tenue. Les
premiers groupes féminins de l’AGCC portent des robes du dimanche faites de
soie noire, mais ce vêtement cher – la soie est également difficile à trouver –
n’est pas adapté pour être vêtu par tout un groupe. « En plus, il
s’accorde mal avec le bredzon, habit de travail qui symbolise le patriotisme et
l’amour du travail de la terre ».
Au XIXe siècle et jusqu’à l’arrivée du pantalon dans la mode féminine, la
robe est avant tout un marqueur féminin régi par un code vestimentaire non
écrit mais bien perceptible. Il existe alors deux types de robes : celles
de cérémonie, en soie, pour les dames élégantes et celles lourdes en laine ou
coton pour les campagnardes.
C’est de cette dernière que s’inspirera le dzaquillon, un costume de
faneuse aux couleurs chatoyantes. Il est composé de quatre pièces : une
robe qui s’ouvre au milieu et par-dessus laquelle l’on met un tablier épinglé
sur le haut de la poitrine. Sous la robe l’on porte un chemisier à manches
courtes bouffantes. Enfin, un foulard complète le costume, couvrant le
décolleté de la robe. Ces tenues sont encore portées de nos jours par les
Gruyèriens, lors de rassemblements, comme la désalpe, la Bénichon, la Poya et
de célébrations.
Noa
Dutoit, Christophe. ‘En
1928, la Gruyère ‘inventa’ son costume traditionnel’. La Gruyère le journal du sud fribourgeois. Edition du jeudi 17
oct. 2013. <http://www.lagruyere.ch/2013/10/en-1928-la-gruyère-«inventa»-son-costume-traditionnel.html>. Retiré le 22 fév. 2014.-
Raboud-Schüle, Isabelle.
‘La robe comme monument. Quand le vêtement dictait sa forme au corps’. Dress Code. Le vêtement dans les collections
fribourgeoises. Hier +
jetzt, ed. 2013. pp. 105-115.
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